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Occupied City : le documentaire choc de Steve McQueen sur la mémoire de la Shoah à Amsterdam

Steve McQueen, le réalisateur oscarisé de 12 Years a Slave, nous plonge dans l’histoire sombre et méconnue de l’occupation nazie à Amsterdam pendant la Seconde Guerre mondiale. Avec Occupied City, présenté hors compétition au Festival de Cannes 2023, il signe un documentaire fleuve de plus de quatre heures, qui mêle récit historique et images contemporaines. Un film radical et bouleversant, qui interroge le rapport entre passé et présent, mémoire et oubli.

Un livre comme point de départ

Occupied City est inspiré de l’ouvrage Atlas of an Occupied City, Amsterdam 1940-1945 de Bianca Stigter, journaliste et historienne néerlandaise. Ce livre propose une cartographie détaillée de la ville d’Amsterdam sous l’occupation allemande, en retraçant les lieux où se sont déroulés des événements marquants ou tragiques : arrestations, déportations, résistance, collaboration, exécutions… Le livre révèle ainsi l’ampleur du génocide juif dans la capitale des Pays-Bas, où près de 80% des juifs ont été assassinés par les nazis.

Voici un aperçu en anglais de ce documentaire :

Une voix-off comme fil conducteur

Pour adapter ce livre à l’écran, Steve McQueen a choisi de recourir à une voix-off, qui nous guide tout au long du film. Cette voix-off nous raconte les faits historiques qui se sont déroulés dans les différents quartiers d’Amsterdam, en s’appuyant sur des témoignages, des documents d’archives ou des sources bibliographiques. La voix-off nous fait ainsi découvrir des histoires personnelles et bouleversantes, comme celle d’Anne Frank, la jeune fille juive qui a tenu son célèbre journal intime dans une annexe secrète, avant d’être arrêtée et déportée ; ou celle de Walter Süskind, le directeur du théâtre hollandais qui a sauvé des centaines d’enfants juifs en les faisant passer clandestinement vers la Suisse.

Une caméra comme témoin

Le film de Steve McQueen n’utilise pas d’images d’archives pour illustrer le propos de la voix-off. Au contraire, il filme la ville d’Amsterdam telle qu’elle est aujourd’hui, en captant ses paysages urbains, ses habitants, ses activités. Le contraste entre le récit du passé et les images du présent est saisissant, et crée un effet de distanciation. Le réalisateur cherche ainsi à nous faire prendre conscience que l’histoire se cache encore dans les lieux que nous fréquentons quotidiennement, même si nous ne les voyons pas. Il nous invite aussi à réfléchir aux liens entre les deux époques, en montrant comment la ville a été affectée par la crise du Covid-19, qui a entraîné des mesures de confinement et de couvre-feu. Sans établir de comparaison directe avec l’occupation nazie, il soulève des questions sur la liberté, la résilience et la solidarité.

Un geste artistique comme hommage

Occupied City est un film ambitieux et exigeant, qui demande au spectateur une grande attention et une forte implication. Sa durée de plus de quatre heures peut paraître décourageante, mais elle est nécessaire pour rendre compte de la complexité et de la richesse du sujet. Le film n’est pas un simple documentaire historique, mais un véritable geste artistique, qui mélange les genres et les formes. Il oscille entre le drame et le thriller, le réalisme et le fantastique, le son et le silence. Il alterne les plans fixes et les plans séquences, les couleurs et le noir et blanc, les gros plans et les vues panoramiques. Il joue avec les contrastes et les symétries, les répétitions et les variations. Il crée ainsi une symphonie urbaine, qui rend hommage à la ville d’Amsterdam et à ses habitants, victimes ou héros de l’histoire.

Anna T.

Le cinéma est pour moi l'art le plus subtile parmi tous. J'ai tenté une carrière plus jeune et j'ai foulé les planches mais sans succès. Mais mon amour pour la scène, la réalisation n'ont pas diminué. J'essaie de vous transmettre un peu de ma passion par l'intermédiaire de mes billets.

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